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Et si le port s'ouvrait à nouveau aux Marseillais ?

A Marseille, le port est le poumon économique de la ville mais reste un lieu fermé qui empêche une bonne partie des habitants d'avoir un accès au littoral. De l'Estaque au Mucem, des barrières empêchent tout visiteur d'accéder au littoral, séparé par le territoire du port. Depuis des années, la question de son ouverture au public fait débat sans réellement trouver de solution.

Publié par Jean-Baptiste Fontana le 29/10/2022
Et si le port s'ouvrait à nouveau aux Marseillais

Eté 2001, ce sont les dernières semaines de liberté sur la digue du large. On s'y promène en famille, on vient y pêcher, les jeunes plongent de la jetée. A cette époque, le port était ouvert librement au public. Les attentats de New York ont imposé de nouvelles normes en matière de sécurité. Désormais, le port est une zone sécurisée et l’on ne peut plus y accéder librement.

Quelques brèches ont malgré tout été entre-ouvertes depuis une décennie. Le centre commercial des Terrasses du Port et la salle de concert du Silo ont leur emprise sur le territoire du port. Bien souvent, le rez-de-chaussée reste inaccessible car utilisé pour l’activité des ferries. Le J1 sera bientôt lui aussi aménagé en un grand espace dédié aux loisirs avec hôtel, de nouveaux commerces et peut-être le port center.

La digue du large, symbole de cette fermeture

En 2013, une exposition fut ouverte au public dans le cadre de l'année culturelle, on accédait à la digue du Large en navette maritime

De l’autre côté du bassin, la digue du Large est le symbole de ces barrières qui ont été fermées aux Marseillais. Longue de plusieurs kilomètres, elle dotée de monuments historiques remarquables comme le pavillon et les cinq anciennes grues restaurées et offre surtout une vue imprenable sur Marseille. Auparavant ouverte au public, l’accès y est désormais interdit sauf pour de rares événements. On y accède alors par navette maritime en évitant de passer par les quais. En quelque sorte, la digue est exclue temporairement du périmètre sécurisé du port. « A ceux qui souhaitent y organiser des choses, le port est ouvert à ça » souligne son Hervé Martel, le Président du directoire du Grand Port Maritime de Marseille. « Mais son accès libre depuis le port comme auparavant, ça ne serait malheureusement pas possible."

Accéder au port via la mer, la dernière liberté à explorer

Des balades en bateau ont été organisées pour visiter le port

Et c’est finalement par la mer que le port pourrait se rouvrir au public. Cet automne, trois visites ont été organisées par le port et le Mucem pour permettre à quelques dizaines de visiteurs de s’offrir une visite commentée. Vu l’engouement de ces balades guidées, le port souhaiterait renouveler l’opération à l’été 2023 et trouver un opérateur touristique pour les organiser sur la durée.

" Se réapproprier le port pour les Marseillais, c’est d’abord le connaître. Aujourd’hui des initiatives avec des visites en bateau contribuent à aider les habitants à comprendre ce qui se passe sur le port. " souligne Laurent Lhardit, l’adjoint en charge du tourisme durable.

"Ce qui se préfigure là avec les visites grand public qui expliquent l’histoire du port mais aussi ce qu’il est aujourd’hui, c’est probablement le plus beau message que l’on puisse adresser. Nous avons évoqué avec le maire l’idée que tous les enfants de Marseille puissent visiter le grand port maritime de Marseille."

A défaut d’un grand musée maritime, un port center pour recréer ce lien entre la ville et son port

Les Terrasses du Port sont une des rares ouverture au public dans le port

Annoncé avant chaque élection et oublié aussitôt après, le projet de grand musée de la mer semble encore bien loin pour Marseille. Mais à l’occasion de la construction du nouveau siège du port au niveau du J0, à proximité de la place la Joliette, un espace devrait être ouvert au grand public : le port center.

Les différents acteurs institutionnels travaillent avec le port pour imaginer cet espace : « Créer un port center qui sera l’endroit où on pourra mettre à disposition des Marseillais une information sur l’histoire du port, sur ce qu’il est aujourd’hui, et puis l’avenir aussi dans un cadre de contraintes et défi climatique. On avoir un échange, et offrir aux Marseillais de comprendre leur relation à la mer via le port. » Explique Laurent Lhardit.


« Un travail est en cours sur la création d’un centre d’interprétation portuaire, sur un lieu où, en plus de la visite, on puisse organiser des conférences, recevoir des scolaires, avoir cette capacité à mieux expliquer le port. » souligne Hervé Martel, le président du port. Les choses pourraient aller assez vite avec l’ouverture dès l’année prochaine d’un premier espace.

D’autres espaces désormais inutilisés du port pourraient eux aussi s’ouvrir au grand public. Le port dispose de deux grands espaces, celui de Marseille bien sûr, mais surtout à Fos avec une surface considérable. L’évolution de son activité libère parfois des espaces. L’entrepôt silo SAGA par exemple ou ceux à grains sont de moins en moins utilisés. A l’Estaque aussi, les plages pourraient avoir une seconde jeunesse.

Christophe Mirmand, Préfet de région : « l’Etat a sa responsabilité à jouer pour faire en sorte que le port ne soit pas contre la ville ou la ville contre le port »

la Skyline marseillaise vue du port

Acteur incontournable dans la gestion et l'avenir du port, l'Etat, par la voix du préfet, donne le cap des enjeux et orientations pour retrouver ces échanges perdus.

Quel regard portez-vous sur les relations complexes entre les Marseillais et le port ?

Christophe Mirmand: « Marseille est son port sont indissolublement liés depuis 27 siècle. Marseille sans son port ne serait pas la cité phocéenne. Le port est aussi l’avenir de Marseille, et des bassins est qui ne soient pas seulement une marina et un parking à bateau blanc si je dois caricaturer, mais qui soit véritablement un poumon économique ».

« Il faut aussi travailler sur l’acceptation du port par la population, tout ce qui doit être entrepris par les pouvoirs publics doit contribuer ces relations plus harmonieuses. Il faut travailler sur un port qui aille vers le zero fumée, c’est-à-dire la capacité d’améliorer l’électrification des quais et la capacité d’accueillir des navires qui fonctionnent avec des énergies renouvelables et au gaz naturel. Et de faire en sorte que les activités portuaires s’intègrent de façon harmonieuse »

"Il faut aussi travailler sur l’interface ville-port, c’est-à-dire faire en sorte que la ville ait davantage accès à la mer."

"C’est-à-dire que les citoyens n’aient pas l’impression que ce port soit un obstacle pour accéder à la Méditerranée, mais que ce soit le moyen aussi de pouvoir accéder à la digue du Large par exemple, et que l’on travaille sur cette culture urbaine avec Euroméditerranée pour améliorer la qualité des interfaces et faire en sorte qu’entre le port et la ville, il y ait des espaces qui soient aussi agréables et désirables par les habitants."

"Je pense qu’il faut commencer à faire des petits pas. Organiser un certain nombre d’événements sur la digue du large par exemple. Puis petit à petit, identifier à la fois une maîtrise d’ouvrage et éventuellement des travaux à réaliser pour sécuriser cette itinérance, et faire en sorte que les Marseillais se réapproprient le port."

"L’Etat souhaitera y contribuer. Ne serait-ce que parce que l’Etat est à la manœuvre sur Euroméditerranée, et pour toutes ces raisons, l’Etat a sa responsabilité à jouer pour faire en sorte que le port ne soit pas contre la ville ou la ville contre le port, mais que véritablement, il y ait une prise en compte dans les perspectives de développement de la ville et de son port d’une vision commune de ce développement."

"La vision du port à 30 ans ou 50 ans, ce n’est pas celle d’avoir une marina ou une activité 100% ludique, mais au contraire, d’avoir une activité portuaire."

"Cette ville est née de la mer, d’une activité maritime et commerciale. Toute son histoire y gravite autour. Elle ne peut pas concevoir son activité future en tournant elle-même le dos au port."

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