Ce lundi, à l’occasion de la création de la SOLIDEO, la structure en charge de l’aménagement des équipements des Jeux Olympiques de 2030, la question de la carte des sites des épreuves a de nouveau été évoquée. Il y a quelques semaines, RmcSport soulevait la possibilité de déplacer les épreuves de hockey sur glace à Lyon au lieu de Nice.
Pour rappel, dans un exercice complexe d’équilibre entre les deux régions, Rhône Alpes Auvergne d’une côté et Provence Alpes Côte d’Azur de l’autre, il a été décidé dans le dossier de candidature auprès du CIO (Comité Olympique International) d’organiser tout le pôle « glace » à Nice. D’autres épreuves auront lieu dans les Alpes du Sud, et notamment dans le Briançonnais. Les Alpes du Nord organiseront elles les épreuves reines du ski alpin, ainsi que le biathlon et le bobsleigh. De même, la cérémonie d’ouverture aura lieu dans le nord et celle de clôture dans le sud.
Sauf que cet équilibre politique se heurte désormais à celui du budget. Aujourd’hui, dans le projet actuel, le pôle glace niçois se compose de trois grands éléments :
- La construction d’une grande patinoire olympique de 10 000 places qui accueillera les épreuves de patinage artistique et short track. C’est un équipement neuf, qui remplacera l’ancienne patinoire obsolète de Nice.
- Les épreuves de hockey sur glace qui doivent être organisées dans le stade de Nice, l'Allianz Riviera, transformé durant quelques mois en une immense double patinoire (détails-ci après)
- Le curling sera lui disputé dans le Palais Nikaia, lui aussi transformé en patinoire éphémère.
Une patinoire éphémère d’entrainement, et sans compétition, complétera le dispositif sur l’actuel terrain du Cavigal Baseball Club. Enfin, le patinage de vitesse sera lui organisé sur un anneau situé hors de France, possiblement en Italie. En effet, la construction d’un tel équipement serait trop cher et difficile à rentabiliser dans un héritage des Jeux.
Le dossier de candidature des JO 2030 a été créé à l’initiative de Renaud Muselier et des Alpes du Sud, il a rapidement été convenu d’y associer les Alpes du Nord, permettant ainsi au dossier des Alpes françaises de séduire immédiatement le CIO par sa force et nombreux atouts. Et notamment parce que ce dossier s’appuie sur l’utilisation des infrastructures existantes et limite au minimum la création de nouveaux équipements.
Un des piliers du projet est donc l’équilibre entre les deux régions, avec une répartition à 50/50 des épreuves et des cérémonies entre le nord et le sud. Aujourd’hui, ces territoires ont réussi à travailler ensemble et manière fluide. Avec moins d’épreuves de montagne, il a été convenu que la région Sud récupère tout le pôle glace. Et c’est sur Nice que ce choix s’est porté. La métropole niçoise devait initialement organiser des épreuves de ski à Isola 2000, elles ont déjà été supprimées il y a quelques mois. Retirer les épreuves de hockey sur glace changerait complètement l’équilibre de la carte, et briserait aussi la parfaite entente entre les deux régions.
Enfin, en imaginant une délocalisation à Lyon, on rajouterait un nouveau site très éloigné des autres dans cette carte des Jeux de 2030. A part l’anneau de vitesse, le projet niçois apporte aujourd’hui, une cohérente territoriale avec toutes les épreuves de glace organisées dans un périmètre de moins de 10 kilomètres.
Dans un contexte budgétaire tendu, c’est uniquement un enjeu financier qui justifierait un déménagement du hockey sur glace de Nice vers Lyon.
En effet, la LDLC Arena dispose sur le papier d’atouts indéniables pour organiser cette compétition : cette salle couverte inaugurée en 2023 peut accueillir jusqu’à 16 000 spectateurs, elle organisera même le championnat du monde de hockey sur glace en 2028 avec Paris. Y organiser les matches de hockey semble simple, en tout cas, bien plus que la transformation du stade de Nice.
L’Allianz Riviera, qui est un stade de football ouvert de 36 000 places, va lui devoir se transformer pour accueillir les épreuves de hockey sur glace des Jeux Olympiques de 2030 : Il sera transformé en deux terrains, l’un pour les compétitions masculines, l’autre pour les féminines. Ils seront séparés par une cloison. On aura ainsi deux enceintes de 17 000 spectateurs dans l'actuel stade, avec des tribunes éphémères autour des cloisons.
Pour assurer la qualité de la glace avec le climat doux de la Côte d’Azur en hiver, le stade devra être provisoirement couvert. Une immense bâche et une surpression à l’intérieur pour conserver un air plus frais à l’intérieur. En termes écologique, on n’est probablement pas dans ce qui se fait de mieux selon les détracteurs du projet.
Dernière contrainte, celle de déplacer durant quelques mois le club local de l’OGC Nice. De décembre à fin février, les Jeux Olympiques privatiseraient entièrement le stade le temps de créer ces deux patinoires éphémères, des compétitions puis du démontage. Pendant ce temps là, il faudrait certainement louer le stade de Monaco pour permettre aux Aiglon d’y jouer la poignée de matches prévus à domicile. Et ça aussi, cela aura un coût.
Pour le président de la Région Provence Alpes Côte d’Azur, il n’y a pas de débat et ferme toute intention de retirer le hockey sur glace de Nice :
« C’est inacceptable et ça a été réglé par le COJO (Comité d’Organisation des Jeux Olympiques – ndlr-). La réussite de ce projet fait en sorte qu’il y a des équilibres territoriaux.» Renaud Muselier
«Imaginez un peu la difficulté si ça va à Lyon. Ces équilibres sont validés, confortés par le CIO. C’est la base du dossier, on n’y touchera pas. Il y a toujours des difficultés dans un dossier. Ce n’était pas la peine d’en rajouter quand vous avez trouvé un équilibre. La glace sera à Nice. » complète Renaud Muselier.
Interrogée au sujet d’un déplacement des épreuves de hockey sur glace, la Ministre des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative refuse de considérer que l’actuelle carte est gravée dans le marbre.
« On n’en est pas là. Aujourd’hui, on regarde la carte des sites telle qu’elle a été posée en candidature, pour se donner un calendrier de travail jusqu’à l’été sur le sujet. On regarde avec des analyses diverses, notamment fournies par les inspecteurs généraux, mais aussi des études lancées par la SOLIDEO pour nous aider à des prises de décision, et trouver la carte des sites optimale, qui va respecter à la fois les enjeux environnementaux et budgétaires. »
Questionnée sur le respect des enjeux d’équilibre entre les deux régions, la ministre complète par celui des enjeux budgétaires, environnementaux et d’héritage pour les habitants. Trois points clairement en défaveur du projet d’aménagement de l’Allianz Riviera niçoise.
Et c’est notamment sur ce volet budgétaire que la ministre exprime des doutes, sans citer précisément le cas du hockey à Nice : « Un projet sur cinq ans peut faire face à des aléas. On en a connu avec Paris 2024, tels que le covid, la guerre en Ukraine, l’augmentation des prix des matières premières, l’inflation… Tous ces sujets là peuvent être amenés à faire bouger la carte des sites. En 2024, tout tenir l’enveloppe budgétaire, on a du revoir la carte des sites. Elle pourra évoluer si le contexte économique doit changer. »
Avec le lancement de la SOLIDEO aujourd’hui et du COJO il y a quelques semaines, les différentes parties prenantes de l’organisation des Jeux Olympiques vont pouvoir affiner les budgets. On parle aujourd’hui d’une enveloppe d’un milliard d’euros d’investissements et de frais pour organiser ces Jeux d’hiver. Un des premiers chantiers est d’établir des études et d’estimer le coût réel de chaque équipement, qu’il soit à créer, moderniser ou transformer provisoirement.
A partir de là, une décision forcément très politique permettra de confirmer ou pas, les engagements déjà pris face au CIO.
Crédit photo une : man_kelly / Depositphotos.com