Pieds nus, une troupe en tutus et aigrettes immaculés dansent sur des rythmes zoulous. Pour sa version du chef-d’oeuvre de Tchaïkovski, Dada Masilo a su mettre à bas les clichés et bousculer les tabous, avec beaucoup d’humour et de culot : le racisme et les coutumes du mariage forcé, les préjugés sur l’homosexualité et le sida. Pour couronner le tout, sa version du Lac des Cygnes, grand spectacle aux allures de fête animée par un conséquent corps de danseurs, était un signal lancé aux conventions artistiques d’Afrique du Sud, où l’oeuvre n’a jamais été interprétée que par des artistes blancs… À peine la trentaine et le crâne rasé, l’artiste formée à P.A.R.T.S., prestigieuse école d’Anne Teresa De Keersmaeker, incarne la redoutable Carmen qui entame sa danse de sexe et de mort. Sur les musiques de Georges Bizet, Rodion Chtchedrine et Arvo Pärt, Dada Masilo reste fidèle à son défi permanent : raconter notre monde à travers des personnages emblématiques qui en incarnent les tensions sociales, les luttes et les espoirs. Dotée d’une rare insolence et d’une jubilation permanente, sa démarche de métissage se révèle éminemment intelligente et fédératrice.