Note d'intention :
Comme nous n’avons jamais travaillé ensemble avec Soly, j’ai préparé une interview. Je lui ai proposé de s’exprimer sur plusieurs sujets en lien avec la parole et la diaspora : la terre, le déplacement, l’exil, la communauté, la place, le genre, les ancêtres, l’héritage, la transmission, les tabous, le silence, la parole, le soin, la guérison...Cette interview a lancé une conversation. A partir de là, j’ai trouvé qu’on avait tellement de matière intéressante dans cette conversation enregistrée que j’ai décidé de la transcrire et de la mettre en scène. Dans cette conversation, nos paroles intimes rejoignent des paroles politiques et des faits historiques. Nous sommes tous deux nés à Madagascar que nous avons tous deux quitté à l’âge de onze ans. Un douloureux déracinement. Nous sommes tous deux Zanatany (enfants de la terre). Nous portons en nous la même blessure originelle. Et même si nos chemins respectifs sont différents, nos identités multiples se ressemblent. Nous avons subi et continuons à subir des oppressions communes. Nous nous retrouvons également sur le front des luttes contre le racisme et contre toutes les autres formes de discriminations.J’ai créé la mise en scène autour de trois scènes phares : l’entrée qui est une sorte de prologue, la prière qui est comme une incantation et la rencontre avec les livres qui est un véritable hommage. Chacune de ces scènes renvoie à sa façon, à la magie, aux traditions, aux ancêtres. Chacune de ces scènes se déroule dans un lieuindéfinissable, sur une frontière ? Le public accède d’emblée à une autre dimension de l’intimité. Le décor est minimaliste. Pourtant chaque objet porte toute une histoire à lui tout seul. Le pari était de répondre à l’invitation de Mamanthé d’une part et de poursuivre une quête initiale de rencontre avec les publics d’autre part.Devant la nécessité renouvelée d’aborder ces sujets, nous aimerions donner plusieurs chances au travail d’être partagé. D’une réponse à une commande, nous passerions à une œuvre avec un circuit de diffusion plus large et qui durerait plus longtemps. Concernant la rencontre avec les publics, nous avons réfléchi à un dispositif à mettre en place dès la fin de la représentation. Pour qu’il soit parfaitement fonctionnel, nous avons besoin de disposer d’un temps suffisamment long pour permettre aux personnes de se dire en toute tranquillité.
MARISOA RAMONJA | Septembre 2022
