Roméo et Juliette

Entre drame élisabéthain, conte oriental illuminé de torches et tragédie contemporaine, les amants de Vérone de David Bobee enflamment la scène de leur passion ardente.

Il y a une destinée particulière de Roméo et Juliette : ils font partie de ces quelques élus, parmi les personnages de fiction, dont la postérité ne dépend plus guère de celle de leur créateur. Ni même du théâtre : à l'état de mythes, «d'étoiles filantes », comme dit le prologue de la pièce, ils illuminent, au ciel des idées - et plus qu'aucun autre couple historique ou légendaire - celle de l'amour. S’emparant de cette actualité du mythe, David Bobee fait de Roméo et Juliette, héros immémoriaux, de tragiques amoureux des temps modernes. Shakespeare l’a écrit pour les faubourgs de Verone, Bobee le met en scène dans des contrées aux couleurs cuivrées qui racontent autant les Mille et Une nuits que les lumières orangées d’espaces urbains devenus territoires de guérilla. Dans cette atmosphère contemporaine, l’âpreté des affrontements entre bandes rivales se teinte de couleurs orientales. Shakespeare a raconté le mariage forcé, la violence et la haine des clans, le poids de la tradition et des familles, Pascal et Antoine Collin qui ont traduit et adapté le texte nous les font entendre dans un langage proche du nôtre.

Proposant une mise en dialogue du jeu, du cirque, de la danse et de la vidéo, le langage scénique de David Bobee est fortement inscrit dans la transdisciplinarité. Son Roméo et Juliette se conçoit à travers le métissage des disciplines et la mixité des cultures. Parce que l’histoire de cette passion, David Bobee la veut inscrite dans les corps, rendant compte d’une physicalité brutale et concrète. Il convoque danseurs et acrobates pour raconter affrontements, amitié et lutte. Une histoire d’aujourd’hui, d’hier et sans doute, hélas, de demain dans un langage scénique énergique, électrique et hautement sensible. A découvrir absolument.