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L'accès aux parcs nationaux pourrait-il devenir payant ?

Face aux besoins croissants de protection et à la surfréquentation, la tentation est grande de passer du modèle gratuit à celui d'une entrée payante pour accéder aux réserves naturelles, notamment dans le Parc National des Calanques ou celui de Port Cros.

Publié par Jean-Baptiste Fontana le 07/09/2021
L?accès aux parcs nationaux pourrait-il devenir bientôt payant ?

C'est un sujet très sensible en France, car l’accès à la nature a toujours été gratuit, c’est le modèle français. Mais avec les enjeux de surfréquentation dans les parcs de Port-Cros et des Calanques, les besoins sont plus importants et l’argent manque pour recruter de nouveaux gardes.

Dans un rapport publié en juin 2018 (à lire ici), plusieurs directeurs de parcs nationaux et fonctionnaires du Ministère de l’Ecologie exploraient les différentes pistes pour améliorer les financements des parcs nationaux, et parmi celles-ci, la possibilité de rendre leur accès payants comme c’est le cas aux Etats-Unis ou plus proche de nous en Croatie.

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Rendre l’accès au parcs nationaux payant ? « Surtout pas, j’espère incarner ce modèle de protection à la française » affirme la Secrétaire d’état en charge du dossier des parcs nationaux. « On a beaucoup de leviers, je ne suis pas du tout persuadée que le fait de rendre payant l’accès à ces aires soit l’alpha et l’omega. On a des leviers fiscaux, on a plein d’options sur la table. Il ne faut pas se couper d’aucune d’entre elles. Ce serait extrêmement attristant de devoir en arriver à cette contrainte ou financiarisation de l’accès à la nature. »

Mais une fois ces bonnes intentions rappelées, il faut donc trouver l’argent, et cette proposition de rendre l’accès aux parcs payant reste tout de même sur la table:

« C’est une réflexion qui a court, parce qu’effectivement, ce modèle français s’empile en strates au fil du temps. On a nécessité à remettre tout sur la table. Ce mode de financement et celui des aires protégées plus largement, de sa biodiversité et sa restauration. Il faut lui trouver ses moyens. Ces moyens peuvent venir de l’Etat, de collectivités voire même de mécènes. Mais ils sont sans doute à reconsidérer. »

Un travail est en cours, et devrait aboutir en début d’année prochaine sur des propositions pour pérenniser le financement de ces aires protégées. Ceci est d’autant plus important que le Président de la République a affirmé son choix de les multiplier. Hors, si ces dernières années de nouveaux parcs ont vu le jour, le budget global consacré à leur financement a lui plutôt stagné voire même baissé certaines années.

 

A Port-Cros, on paye déjà pour accéder au parc sans le savoir

A défaut de proposer un ticket payant à l’entrée, les parcs disposent déjà de leviers avec les taxes qu’ils collectent.

A chaque fois qu'il pose le pied à Porquerolles ou Port-Cros depuis une navette maritime, chaque visiteur paye 60 centimes intégrés dans le prix du billet et qui vont dans les caisses du parc.

Créée en 1995, c’est la taxe barnier à hauteur de 7% du prix des billets des navettes maritimes et autres bateaux de promenade. Elle qui est indirectement reversée aux parcs nationaux. Pour les Calanques, cela représente tout de même 600.000 € par an prélevés sur les billets des promenades en bateau dans l'enceinte du parc national. Cela représente un peu moins d’un dixième du budget du parc.

Les collectivités locales participent faiblement aux frais de fonctionnement du parc, c'est moins de 5% du budget, mais par contre, elles sont plus impliquées dans des projets d'investissement qu'elles soutiennent. C'est le cas par exemple sur le sémaphore de Callelongque explique Didier Réault, le président du Parc National: « C’était une propriété de l’armée. Le Ministère de l’écologie l’a ensuite cédé au parc. Et là, c’est le Département qui a payé les frais de mise en sécurisation et va payer l’investissement sur l’accueil du public. »

Des partenariats sont également conclus avec des mécènes ou des entreprises privées qui s'investissent sur des actions concrètes autour de la biodiversité ou de la restauration du patrimoine dans les parcs.

Pas d’entrées payantes mais davantage de taxes

Pour le moment, il n’est donc pas à l’ordre du jour de rendre l’accès au parc des Calanques payant, y compris même pour Sugiton dont l’accès se fera sur réservation gratuite exclusivement dès l'été prochain.

Au niveau des acteurs locaux, c’est un non ferme et catégorique : « A aucun moment nous n’accepterons ni le naming, ni l’accès payant aux calanques. Préserver la biodiversité marine, cela ne veut pas dire empêcher l’accès à certains. » affirme Christine Juste, l’Adjointe au Maire de Marseille en charge de l’Environnement.

Même tonalité du côté de Didier Réault, le Président du Parc des Calanques : « Le contribuable a déjà payé l’acquisition des espaces, qu’il paye également pour leur gestion et leur entretien. Je ne vois pas pourquoi on leur ferait payer une deuxième fois. »

Mais par contre, dans sa quête de financements pour équilibrer son budget, le président du parc national réfléchit à de nouvelles sources de revenus : « Ce qui est imaginable, c’est de faire payer des services annexes, comme le transport de passagers en mer, le transport urbain pour aller sur un site, le parking et un certain nombre de services. »

Puisque les habitants payent avec leurs impôts le financement du parc, les touristes pourraient eux le faire au moyen d’une taxe de séjour. La question du mouillage des bateaux dans la réserve est sensible: Pour protéger la posidonie, des bouées vont être installées dans les zones sensibles pour que les bateaux s’y amarrent. La discussion est en cours, mais leur utilisation pourrait devenir payante et même obligatoire dans certains secteurs.

« Vous pouvez mouiller partout dans le parc où il y a du sable. Pas sur l’herbier de posidonie et sauf à Envau et Port pin. En contrepartie, l’état et les collectivités se sont engagées à équiper des zones de mouillage léger qui seront des espèces d’avant port qui seront sur réservation. On ne sait pas encore si ce sera payant ou pas, ce sera certainement géré par la métropole » explique Didier Reault

« Au Parc National,  En complément de la stratégie de mouillage, nous pensons instaurer une taxe sur la location de bateau qui serait payée comme une taxe de séjour. » Didier Réault

Au final, les taxes risquent de se multiplier pour boucler les budgets du parc et il sera bien difficile d'y accéder sans payer d'une manière ou d'une autre.

 

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