Le séjour de Van Gogh en Provence, depuis son arrivée à Arles sous la neige en février 1888 jusqu’à son départ de Saint-Rémy-de-Provence vingt-sept mois plus tard, semble à la fois romanesque et tragique. L’embrasement de sa peinture, l’important développement de sa correspondance, sa maison jaune, la visite de Gauguin, son oreille mutilée, ses crises de dépression, sont autant d’ingrédients qui nourrissent la légende de l’artiste, véritable conte d’hiver.
Au-delà du mythe demeure cependant la réalité de son œuvre, qui s’épanouit à cette période, et de ses lettres, qui deviennent un laboratoire pour approfondir sa pensée artistique. Le travail du maître néerlandais acquiert alors une dimension telle qu’il inspire aujourd’hui encore créateurs et créatrices du monde entier et consacre la position de Vincent en tant qu’« anneau dans la chaîne des artistes1 ».
Cœur battant de l’exposition « à Vincent : un conte d’hiver », l’attention que portent les artistes d’aujourd’hui à Van Gogh a orienté les œuvres qu’ils et elles ont choisi de présenter à la Fondation et qui deviennent autant de lettres adressées à Vincent. À travers différents médiums, styles et techniques, ils et elles explorent et prolongent les réflexions formulées dans la correspondance du peintre – qu’elles soient liées au paysage, à la lumière, à la couleur, au portrait, à l’amitié ou encore à la solitude. Ces réponses énoncent à leur tour un tout autre conte.
L’exposition présente le travail de vingt-deux artistes, issus de plusieurs générations et parfois méconnus – comme Dominique Ferrat (née en 1954), qui a développé son œuvre à l’écart des regards pendant plus de quarante ans, ou encore James Castle (1899-1977), souvent associé à l’art brut. D’autres, dont les préoccupations rejoignent certaines de celles de Vincent, font partie des figures décisives de l’art contemporain : Harold Ancart (né en 1980), Rineke Dijkstra (née en 1959), Joseph Grigely (né en 1956), Nathanaëlle Herbelin (née en 1989), Ann Veronica Janssens (née en 1956), Mark Manders (né en 1968), Wolfgang Tillmans (né en 1968) ou encore Anselm Kiefer (né en 1945), qui présente les dessins qu’il réalisa en Provence lorsque, âgé de dix-sept ans, il voyageait sur les traces de Van Gogh.
Enfin, auprès de figures historiques – comme Gustave Fayet (1865-1925), qui contribua en tant qu’artiste-collectionneur à la gloire de Van Gogh, Hans Josephsohn (1920-2012) et ses puissantes sculptures, le turbulent Isidore Isou (1925-2007) et ses créations hypergraphiques – des créateurs et créatrices d’aujourd’hui répondent à leur tour à cette correspondance en réalisant des œuvres spécialement pour l’exposition – Jacopo Benassi (né en 1970), Martin Boyce (né en 1967), Gérard Collin-Thiébaut (né en 1946), Simone Fattal (née en 1942) ou encore Louise Sartor (née en 1988).
La résonance de ces œuvres avec l’œuvre et la vie de Van Gogh sera amplifiée par la présence de deux toiles du peintre, prêtées par le musée Van Gogh d’Amsterdam, d’une lettre authentique adressée à Gauguin, conservée au musée Réattu d’Arles, ainsi que par la présentation d’anciennes éditions et extraits de la correspondance de Van Gogh.
Un catalogue édité par la Fondation reproduira le parcours singulier de cette exposition, construite à partir des grands thèmes de la correspondance, et offrira à la lecture deux lettres inédites adressées à Van Gogh par Sylvain Prudhomme – lui souhaitant la bienvenue en Provence – et Louise Chennevière – le saluant au moment de son départ.