14,56°, c'est la température de l'eau de mer relevée ce mardi matin à 5h par les thermomètres connectés du laboratoire MIO de l'Observatoire des Sciences de l'Univers PYTHEAS devant le port de Carro sur la commune de Martigues sur la Côte Bleue. Il y a moins d'un mois, c'était presque 29°. Les différentes épisodes de mistral ont considérablement fait chuter la température de l'eau dans les Bouches du Rhône, et dans une moindre mesure dans le Var.
Le laboratoire MIO de l'Observatoire des Sciences de l'Univers PYTHEAS dispose de plusieurs capteurs de température de l’eau de mer et suit en temps réel son évolution. Du côté de Saint-Tropez, là où le mistral a bien moins soufflé, l'évolution de la température de l'eau est inverse: l'eau y est à 23°, elle a même augmenté depuis le début du weekend dernier.
Contrairement à ce que peuvent affirmer certains météorologistes ou médias, une telle chute de la température de l'eau de mer est assez fréquente lors des épisodes de mistral. Le 7 août 2023, la température du capteur de Carro était même tombée à 13,5°, soit un degré de moins qu'aujourd'hui.
Finalement, à chaque épisode de mistral, on assiste à une chute brutale de la température de l'eau et qui est assez rapidement reprise. Après le précédent épisode du 9 juillet, il n'avait fallu que cinq jours pour passer de 15° à 23° dans l'eau à Carro.
La chute de ces températures de l’eau n’est pas uniforme. Là où il n'y a pas eu de mistral, la température de l'eau augmente ou se stabilise entre 25° et 27°. Seule une canicule pourrait la faire davantage augmenter. Mais inversement, dans les plages proches de caps et exposées au large et au mistral, la chute est bien plus forte à cause du phénomène d'upwelling.
Contrairement à ce que l'on pourrait penser, ce n'est pas uniquement le vent qui souffle sur la mer qui provoque sa baisse de température, mais bien un phénomène de courantologie.
En effet, en Provence, le mistral vient généralement de terre vers la mer, comme à La Ciotat ou sur Côte Bleue, il pousse donc les eaux de surface chaudes vers le large. Ces eaux de surface peuvent aussi s'évaporer plus rapidement à cause des vagues et de la force du vent. La nature ayant horreur du vide, elles sont immédiatement remplacées par cette eau froide venue des profondeurs.
Car il faut savoir que ces eaux habituellement chaudes en été, le sont en réalité uniquement sur les premiers mètres de profondeur, ensuite, dès plusieurs dizaines de mètres, la température de la mer chute à moins de 13°.
Le mistral a donc chassé les eaux de surface chaudes comme l'explique ce schéma:
Si cette arrivée d'eau froide sur les plages désespère les baigneurs peu téméraires, c'est une excellente nouvelle pour la nature: Des eaux trop chaudes ont un effet dévastateur pour les écosystèmes, avec la disparition des gorgones (c'était le cas en 2022 dans les Calanques), la prolifération d'espèces invasives exotiques, ou encore l'arrivée de vers et poissons venimeux exotiques... C'est toute la biodiversité actuelle qui est remise en cause quand la Méditerranée est en surchauffe.
Ces courants d'eau glacée venus des profondeurs amènent aussi du phytoplancton et des méduses.
Pour le plancton, c’est une très bonne chose car particules microscopiques sont un élément essentiel dans la chaîne alimentaire des poissons. Pour les méduses, cela ravira l’appetit de certains poissons, mais certainement pas les baigneurs. En effet, les méduses se laissent porter par les courants. Celles qui étaient dans les profondeurs risquent donc de débarquer dans les prochains jours sur nos plages. En général, on constate une recrudescence de leur présence après les épisodes de mistral.
Une fois le mistral tombé, la température de l'air va se réchauffer bien plus rapidement que celle de la mer. L’écart entre la température de l’air et celle de l’eau sera donc très important, parfois entre 15° et 20°, et encore plus si on reste de manière prolongée à bronzer en plein soleil.
En entrant trop rapidement dans l’eau, on risque un choc thermique , c’est l’hydrocution. Il peut être fatal aux baigneurs. Cet été, il y a eu déjà plusieurs décès sur les côtes provençalces à cause de celà: Car un malaise dans l'eau se transforme rapidement en noyade.
Pour éviter ce risque, il faut rentrer progressivement dans l'eau ou se mouiller la nuque et le corps, afin de l'habituer à cette eau froide. Des crampes, frissons, troubles visuels ou auditifs, maux de tête ou sensation de malaise peuvent être des signes d'une hydrocution, il faut alors immédiatement appeler les secours.
C’est aussi pour cela que de nombreux surveillants de plage hissent un drapeau jaune synonyme de danger malgré une mer calme et aucun danger apparent : le choc thermique peut être violent si on n’y fait pas attention.
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