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Interview AaRON : ''On aime bien dire qu'on fait des photographies musicales''

C'est avec un nouvel album dans les bacs que le duo AaRON a repris le chemin de la scène. Il sera en concert dans la région, à cette occasion, nous avons rencontré Simon Buret.

Publié par Jean-Baptiste Fontana le 20/11/2015
Interview AaRON : ''On aime bien dire qu'on fait des photographies musicales''

5 ans se sont écoulés depuis la sortie de votre dernier album.  Vous aviez besoin de faire une pause ? Simplement de prendre le temps ?

"Je pense que c'est un peu un mélange des deux. Je pense qu'à la fin du dernier album qui a été intense, on a eu envie de retrouver des vies plus intimes, plus solitaires peut être, enfin moins exposées du moins. Le succès des albums précédents nous a autorisé à prendre le temps et à reculer la prochaine sortie.

Parce que c'est important d'avoir des choses à dire pour prendre la parole, de ne pas se retrouver à juste suivre un cap pour le suivre, et qui ne serait pas la bonne direction à prendre. On a vraiment pris le temps, sans se dire quand on allait faire cet album. On a pris le temps d'être rempli, d'être inspiré comme il le faut pour repartir sur un bel enregistrement."

"On aime bien dire qu'on fait des photographies musicales."

Il y a eu un déclic, un élément déclencheur de ce processus de création ?

"Pas vraiment un déclic, mais je pense que l'envie grandissait de plus en plus. On s'est fait écouter des maquettes, tous les deux en même temps. De mon côté j'avais composé une partie du morceau Blouson noir, j'ai voulu faire écouter la maquette à Olivier. Lui de son côté avait fait toute la piste sonore de We cut the night, qu'il m'a fait écouter.

Du coup on s'est rendu compte qu'on avait exactement les mêmes envies sonores et musicales et c'était donc intéressant pour nous de retourner en studios à ce moment là. On s'est pas dit "tiens on retourne faire un album", mais on avait envie de créer ça, on s'est fait surprendre et voilà."



Comment sont répartis les rôles dans la création ? Vous créez séparément ? Confrontez vos idées respectives ? 

"C'est très aléatoire. Notre influence principale étant la vie au quotidien, ce qui nous traverse on compose beaucoup chacun de notre côté. On note des choses, des moments, des rencontres, on aime bien dire qu'on fait des photographies musicales. On parle de rencontres de choses de la vie qu'on a envie de poser. On récolte chacun des choses de notre côté et ensuite on les confronte. Après c'est que du rebond."

Au niveau des influences, qu'est-ce qui vous inspire ? Vous transporte et vous permet d'écrire ?

"Les influences c'est la vie en elle-même. C'est nous, c'est ce qu'on traverse, on a envie de parler de choses qu'on traverse et qui nous traversent. Les influences sont bien plus visuelles que musicales. On n'a jamais vraiment eu envie de faire partie d'un mouvement, d'un style ou d'être rattaché à quelque chose. On a envie d'intéresser par des choses qui traversent. Ca passe par des artistes comme Bill Viola, sur cet album là, qui a une façon de mettre en lumière sa musique intérieure assez claire et précise. C'est assez beau de voir comment il apporte aux spectateurs ses ambitions personnelles et ses envies, ses angoisses, tout ce qui le traverse. Il y aussi Gregory Crewdson qui est un grand photographe qui travaille beaucoup sur le clair-obscur. C'est un album qu'on a vraiment voulu dans ces tons là. Une nuit très lumineuse et éclairée.

Des lectures aussi Tomas Tranströmer, et d'autres gens comme ça, qui ont une façon très minérale de parler de la vie et de la position de l'humain dans le monde. C'est vrai que ce qui résonne en nous de plus en plus ce sont les grands espaces, on se ressource beaucoup dans le voyage. On se retrouve beaucoup dans la solitude du voyage et dans la position de la petitesse de nos émotions face aux grands espaces. La force des grands espaces, ça nous parle beaucoup et ça nous inspire aussi beaucoup dans notre musique."

"On essaie d'être des déclencheurs."

Quelle est votre notion à l'image ? Vous scénarisez vos clips ? 

"On est très attaché à l'image. On aime tout ce qui va amener à notre musique en fait. On ne voit pas les clips, ou même la pochette comme des outils de promotion, c'est donc important pour nous de les travailler, car ce sont aussi des vecteurs d'émotion.

Ce qui nous intéresse c'est de créer une émotion chez l'auditeur ou chez le spectateur. Que ce soit lui qui colore ce qu'il entend avec sa propre expérience, et que ce ne soit pas nous qui dictions le sentiment. Ce qu'on essaie de faire c'est que texte et musique soient fusionnels, enveloppants et qu'il y ait vraiment plusieurs couches de lecture. L'idée c'est que le spectateur trouve des points d'épanchement dans l'oeuvre en fonction de sa propre expérience, de la nuit ou de la journée qu'il vient de passer...On essaie d'être des déclencheurs."

C'est plus difficile sur scène d'emmener le public dans un univers ?

"En concert on cherche une autre forme d'énergie. Tout le monde est ancré dans le présent et ce qu'on veut, c'est tenir une forme de climat. On emmène les gens quelque part et on se laisse emmener aussi. On pousse le trait avec l'espace scénique, la lumière, la setlist on prend autant qu'on donne. Un concert c'est particulier, on vit quelque chose d'extrême dans le présent, les pleurs, les rires, les photos, c'est très étrange. C'est deux écoutes distinctes. On présente ce qu'on a fait de manière immédiate donc c'est forcément différent."

Vous avez réalisé la B.O du film Les yeux fermés. Le cinéma c'est une envie ?

"Le projet en général peut être illustrer une pièce, une exposition. Il y a plein de choses à faire ça dépend toujours de ce qu'on nous propose. C'est les univers qui se confrontent qu'on aime, mais il n'y a pas de supports précis qui nous excitent plus que d'autres. C'est une possibilité mais pas une recherche absolue."


Photo : François Berthier

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