n mêlant mélopées, danses et costumes extraordinaires Marcos Morau y imagine un monde totalement fantasmagorique.
Avec l'arrivée en scène de ses 9 interprètes à la fois danseuses et chanteuses le ton est donné : Dans leur longues robes dissimulant leurs pieds, elles semblent flotter et se déplacent à un rythme effréné. Sensation de ruche ou chaque interprête n'existe que comme particule élémentaire d'une entité qui le dépasse.
Plus que des tableaux chorégraphiques Marcos Morau crée un véritable univers. Il y a dans "Sonoma" tout un héritage culturel, une force ancestrale qui devient subitement éminemment actuelle. Les contours entre passé et présent s'estompent.
Les costumes renvoient à notre civilisation, à l'ordre des traditions alors que le language corporel évoque la folie et la bestialité. Les images et l'ecriture chorégraphique sont fortes avec des déplacements et uniquement des ensembles, rien n'est manichéen et on oscille sans répit entre sensations oniriques ou plus souvent cauchemardesques car il y a de la douleur, de la démence dans cette oeuvre.
Dans ces mouvements, dans ces cris et ces mélopées, on ressent le poids du passé avec une esthétique semblant surgir non pas de l'histoire mais de notre histoire.
Et puis, osons le, cette œuvre est aussi féministe. On ne peut pas ignorer que ces femmes sont en révolte, dans ces costumes et dans ces gestes, il y a les mariages forcés, les guerres, la maternité, ... toutes les contraintes sociétales.
Le temps de la pièce, ces interprètes portent avec force un fardeau qui pourrait être le carcan de la société patriarcale, jusqu'au final libérateur où elles reprennent possession de leur présent.
C'est courageux, c'est esthétique sans être esthétisant, parle à nos instincts avec intelligence, c'est un chef d’œuvre.
Didier PHILISPART